« L’IA dans l’immobilier est essentielle pour recréer du lien » : Rencontre avec Renaud Dalbera

À 38 ans, Renaud Dalbera incarne parfaitement la nouvelle génération d’entrepreneurs immobiliers qui bouleversent les codes traditionnels du secteur. Après avoir développé pendant vingt ans le cabinet d’administration de biens familial créé en 1983, il vient de tourner une page importante en cédant l’entreprise au groupe Citya. Entre gestion de patrimoine, location saisonnière et investissements dans les startups de la proptech, son parcours illustre la transformation d’un secteur en pleine mutation technologique.

 

Pour commencer, pouvez-vous vous présenter rapidement ?

Je m’appelle Renaud Dalbera, j’ai 38 ans. Je suis sur la Côte d’azur, né à Nice et de famille niçoise. Mon secteur d’activité est principalement l’immobilier, et j’adore tout ce qui attrait aux nouvelles technologies.

Pouvez-vous nous en dire plus sur votre parcours professionnel ? Avez-vous toujours été dans l’immobilier ?

J’ai baigné dans l’entreprise familiale. C’est mon père qui a fondé un cabinet de syndic de copropriété et de gestion locative en 1983. Dès l’âge de douze ans, j’ai commencé à travailler à ses côtés pendant les vacances scolaires. J’ai commencé par la comptabilité du cabinet. Mon père avait voulu mettre en place un logiciel métier pour remplacer le vieux registre papier que tenait ma grand-mère. Comme j’adorais l’informatique, j’ai commencé à saisir tous les comptes et à apprendre le plan comptable tout seul en lisant la documentation.

À quinze ans, j’ai assisté à ma première assemblée générale. Je quittais le lycée pour descendre au bureau à pied et tenir l’assemblée aux côtés de mon père, juste pour gérer les votes et faire le compte-rendu. En parallèle, j’avais créé un site internet qui commençait à rapporter un peu d’argent. J’y abordais toutes les technologies, notamment la fibre optique dont on ne parlait pas du tout à l’époque.

À 17 ans, j’ai créé une société avec un ami pour pouvoir encaisser les revenus de ce site et installer de l’informatique dans des entreprises. Mais ça n’a jamais été ma passion, je n’avais pas la patience avec les bugs informatiques. Je suis donc resté en parallèle dans l’immobilier et j’ai créé la partie transactions à 18 ans dans le cabinet de mon père, en lui disant qu’il fallait développer ce secteur qu’il n’avait pas du tout exploité. En parallèle, je me suis orienté vers la gestion de patrimoine car mon objectif était de développer des services plus larges. L’immobilier était mon socle, mais je voulais apporter d’autres cordes à mon arc pour répondre aux besoins variés des clients : crédits, assurances, fiscalité…

Pourquoi avoir ouvert la branche Transactions au sein du cabinet ?

L’idée était de capitaliser sur notre vivier de clientèle en syndic et gestion locative pour devenir l’intermédiaire des ventes immobilières. Le but était de récupérer les mandats de vente et de créer ce service avec une nouvelle image. C’est très différent de la gestion : le gestionnaire a une vision long terme avec des décisions lentes liées aux assemblées générales, alors que la transaction nécessite d’être hyper réactif. On est vraiment dans l’opposé : la négociation, le commercial, savoir se vendre. Ça m’a donné envie de développer cet aspect, d’ouvrir un espace avec une vitrine et de mettre en place tout un service marketing.

La transaction, c’est l’opposé de la gestion : il faut être hyper réactif, savoir se vendre.

Et cela a débouché naturellement sur le conseil en gestion de patrimoine…

Oui ! En 2013, quatre ans après mes études, j’ai créé une structure de conseil en gestion de patrimoine avec un ami qui avait fait le même master que moi. Il était spécialisé sur les sportifs de haut niveau, étant lui-même un ancien footballeur qui s’était blessé très jeune. Notre objectif était de développer cette clientèle très particulière des footballeurs, avec toutes les contraintes réglementaires que cela implique. 

On essaie toutes les solutions possibles quand on démarre une activité comme celle-ci. J’ai eu la chance d’avoir ce vivier de clientèle que mon père avait créé sur Nice. Mais il y avait aussi un frein : mon père avait certes une image très professionnelle et une grande confiance de la part de ses clients, mais limitée au métier de syndic. Les gens n’avaient pas le réflexe de nous voir différemment. Il a donc fallu mettre en place toute une campagne marketing avec les bons codes et apporter ce service au bon prix.

J’ai continué cette activité jusqu’en 2020, date à laquelle j’ai pu vendre mes parts à mon associé pour me recentrer sur l’immobilier, qui se développait bien.

Pour quelqu’un qui voulait fuir les problèmes en tant que développeur web, vous vous êtes finalement retrouvé dans une activité où les problèmes sont omniprésents !

[Rires] Ce ne sont pas les mêmes types de problèmes ! C’est le côté humain qui est intéressant et enrichissant, le fait aussi que ce ne soit jamais la même chose. Dans une copropriété, on touche à tellement de domaines : parfois c’est de la politique, parfois de la technique, de l’économique, du social, du comptable, du juridique… C’est très enrichissant.

Et puis vous avez vendu le cabinet familial récemment ?

Oui, j’ai eu une opportunité avec le groupe Citya, qui se dispute la première place avec Foncia. Ils ont souhaité racheter mon cabinet et j’ai donc vendu une structure qui avait 40 ans d’existence. Je les ai accompagnés pendant un an et demi pour assurer la transition, jusqu’au 31 décembre dernier.

C’était une expérience très enrichissante car vous découvrez d’autres méthodes. Quand vous êtes indépendant, vous faites tout vous-même. Il y a des choses que vous faites bien, d’autres moins bien. Dans un groupe, vous avez une vision plus globale, plus professionnalisée mais plus “processisé”.

Comment s’est prise la décision de vendre ?

Il y a eu une grosse vague de rachat de cabinets avec des valorisations importantes. En tant que président du syndicat de l’immobilier de l’UNIS Côte d’Azur et de la commission innovation au niveau national, je croisais constamment ces grands groupes. Ils me sollicitaient depuis quelque temps. C’était une opportunité : soit je continuais à travailler encore 5-7 ans pour atteindre cette valorisation, soit je saisissais l’occasion pour me diriger vers d’autres domaines qui me plaisent aussi. 

Aujourd’hui, vous êtes focalisé sur la location saisonnière. Comment se porte ce marché par rapport à l’immobilier traditionnel qui traverse une période difficile ?

Ce n’est pas du tout le même marché. La location saisonnière est très liée au tourisme. Elle est beaucoup plus difficile à maîtriser, avec plus de risques, mais aussi beaucoup plus intéressante pour le propriétaire qui investit. On arrive plus facilement vers des rentabilités de 8-10% brut, là où on est à 4-5% sur du classique.

La réglementation est venue durcir un peu la location meublée touristique, mais je ne vois pas d’inconvénient à une réglementation qui reste juste. En tant que professionnel, cela signifie que le propriétaire va davantage se tourner vers des professionnels pour être dans les règles. Aujourd’hui, on a des outils d’intelligence artificielle qui nous aident à gérer les prix de façon très variable, au jour le jour, en fonction de la demande et des événements.

Quels sont vos projets pour la location saisonnière ?

Notre société SmartBNB fait maintenant plus d’un million d’euros de chiffre d’affaires, ce qui est une belle étape. Pour 2025, l’objectif est de nous développer sur d’autres villes de la Côte d’Azur. Nous avons la chance d’être sur un territoire très demandé touristiquement, aussi bien pour les événements que pour l’activité économique. Nous voulons nous étendre à l’Est et à l’Ouest du département, soit par croissance externe, soit par croissance interne en installant de nouvelles agences.

Vous mentionniez les nouvelles technologies. Voyez-vous une différence entre ceux qui s’y intéressent et ceux qui y sont réfractaires dans l’immobilier ?

Oui, clairement. On ne voit pas encore tous les effets, mais on sent qu’il y a un réel virage. Même une petite agence de syndic est envahie par les demandes clients, et en particulier les mails et les appels… Beaucoup n’ont pas pris ces outils et n’ont même plus la capacité de répondre à la masse qui est face à eux.

Je crois beaucoup en ces outils : ils ne sont pas là pour remplacer le professionnel mais pour l’aider à gagner du temps et à recréer du lien, à personnaliser le service. Par exemple, l’IA peut aider un nouveau collaborateur à être plus efficace en lui résumant le règlement de copropriété ou en lui apportant des pré-réponses.

Je pense que ceux qui ne franchiront pas le pas seront soit condamnés à rester dans un petit univers, soit ils vivoteront en loupant certaines opportunités. Et puis il y aura ceux qui auront plus d’envergure, qui pourront apporter un nouveau service et répondre à la demande de la nouvelle génération, attentive à cette réactivité.

En tant qu’investisseur, dans quoi investis-tu aujourd’hui ?

J’investis uniquement dans ce que je comprends et ce que je connais. Même si je pense que la tech au sens large est une bonne opportunité, si je ne comprends pas ou ne connais pas bien le domaine, je n’y vais pas. Comme pour l’immobilier d’ailleurs, je ne vais pas partir sur des régions que je ne connais pas du tout.

Étant un peu geek, j’aime regarder régulièrement des dossiers de startups. Je préside d’ailleurs la commission Innovation de mon syndicat depuis presque six ans. Dès que j’ai une opportunité sur une startup avec un modèle économique auquel je crois, je m’y intéresse. Mais il faut absolument une visée de rentabilité cohérente à court-moyen terme.

J’ai récemment investi dans Joe.ai, un agent conversationnel qui permet de répondre au téléphone par une IA qui va piocher dans l’outil métier pour qualifier la demande du client. Je trouve ça merveilleux.

Vous avez aussi investi dans le fonds du groupe Caption, Blueberry. Pourquoi ?

Oui, pour plusieurs raisons. D’abord, j’aime la thèse d’investissement du fonds, avec des startups early stage de niche qui ont un fort potentiel pour faire bouger les codes de leur secteur. 

Ensuite, la relation avec les gérants a fait la différence : un esprit d’échange, de convivialité, où les investisseurs sont impliqués dans les décisions. On a la possibilité de co-investir en plus du fonds sur les projets auxquels on croit. Pour un entrepreneur dans l’âme, c’est très important. Si je trouve un projet magnifique, je peux remettre des billes personnellement en plus de ceux du fond et prendre un peu plus de risque.

Cerise sur le gâteau, il y avait aussi un intérêt fiscal avec le 150-0 B ter, puisque, suite à la cession de ma société, j’avais un remploi à effectuer, et Blueberry répondait parfaitement aux exigences de ce dispositif.

Pour finir, avez-vous une recommandation à partager ? Un livre, un film, une série ?

Je recommanderais deux applications qui me paraissent importantes : Cafeyn – un kiosque de presse numérique – et Koober pour les résumés de livres. Étant un peu hyperactif, j’ai du mal à me concentrer sur un livre, et ces outils me permettent d’avoir accès à des contenus variés et d’ouvrir l’esprit sur différents domaines. J’adore lire des articles sur les sciences, la médecine, le cinéma, les technologies… Cette vision différente permet d’avoir des idées à transposer dans son propre domaine d’activité.

💡 Cet article vous a intéressé ?

Pour plus d'informations, visitez Caption et découvrez nos offres d'investissement. Du Private Equity aux objets de collection, Caption vous ouvre des opportunités d'investissement uniques : start-ups, montres, oeuvres d'art, parts de fonds, et plus encore.